Genré.e

 

 

La pensée est-elle « genrée » ? 

La question est stupide, mais beaucoup de féministes, de wokistes, de penseurs politiquement corrects se la posent quand même.

   Quand je lis Blaise Pascal ou Simone Weil, est-ce que je m’interroge sur leur sexe ? Est-ce que leur genre a déterminé leur réflexion ? Est-ce que je tiens compte de leur masculinité ou de leur féminité (relatives) pour juger de ce qu’ils m’apprennent ? Si je me pose la question, je suis sur la voie de l’égarement.

   Traditionnellement, on disait que les hommes étaient surtout rationnels et les femmes plutôt sensibles. L’a priori a fait long feu ; alors on a tenté de dépasser cette distinction binaire. Tous les cerveaux se ressemblent, a-t-on commencé à reconnaître. Mais voilà que quelques radicaux (quelques radicales), né.e.s de la dernière pluie, veulent nous convaincre que la production intellectuelle féminine est quand même différente de la production intellectuelle masculine*. On se raccroche toujours à « sa » différence.

   Là où le problème s’aggrave, c’est que la production artistique des femmes d’aujourd’hui (littérature, théâtre, cinéma, arts visuels) paraît exclusivement centrée sur le thème de la « condition de la femme ». Est-ce que leurs prédécesseurs, c’est-à-dire les artistes hommes d’antan écrivaient d’abord sur leur condition masculine ? Je n’en vois aucune trace dans le théâtre de Shakespeare, par exemple, et je le connais bien. Les autrices à venir auront vraiment gagné leur indépendance quand elles parleront enfin d’autre chose que d’elles-mêmes.

   Les auteurs et les autrices sont tous des auteurs. La seule différence qui compte est de savoir s’ils sont bons ou non.

 

* Voir le dernier ouvrage de Carol Gilligan, Une voix humaine, chez Flammarion.

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