Shakespeare

Vénus et Adonis

Was William raped ?

 

William Shakespeare a-t-il été violé à 17 ans par celle qu’il a été contraint d’épouser, Anne Hathaway, de 8 ans son aînée ? Beaucoup de « spécialistes » de Shakespeare, un peu amateurs de scandale, le pensent. Dix-sept ans, c’est bien jeune ! Même au XVIe siècle.

   Il est singulier que les deux œuvres poétiques que Shakespeare a d’abord produites — les Sonnets sont beaucoup plus tardifs et ont failli ne jamais paraître —, Le Viol de Lucrèce et Vénus et Adonis, racontent tous les deux des viols. Les deux poèmes dramatiques ont été écrits entre 1592 et 1594, « à la faveur » de la fermeture des théâtres à Londres, pour cause de peste. Shakespeare avait le temps d’écrire et il en a profité pour affiner son style. Les deux œuvres ont eu un succès retentissant. À la réouverture des théâtres, avec Peines d’amour perdues et surtout Roméo et Juliette, sa carrière était lancée, il n’a plus publié de poésie — tout en continuant d’écrire ses Sonnets dans l’intimité et la solitude.

   Il n’est pas beaucoup question de viol dans l’œuvre théâtrale, encore que, dans La Nuit des Rois, le comportement du Duc Orsino vis-à-vis de Viola (sic) qu’il prend pour un garçon, Césario (sic), est proche de cette tentation. Mais Shakespeare s’arrête à la tentation. Dans Périclès, on trouve aussi ce thème, mais la pièce est-elle de la main de Shakespeare ?

   Dans les Sonnets, W.H., le beau jeune homme, est certainement maltraité par la Dame sombre, mais il semble presque consentant, et c’est ce qui affole le poète qui l’adule.

   Le cas d’Adonis est captivant, puisqu’il s’agit du viol d’un bel éphèbe par une femme mûre. Le poème commence ainsi :

 

Rose-cheek’d Adonis hied him to the chase ;

Hunting he lov’d, but love he laugh’d to scorn ;

Sick-thoughted Venus makes amain unto him,

And like a bold-fac’d suitor ’grins to woo him.

 

Adonis au teint de rose se préparait à aller chasser ;

Il adorait la chasse, mais l’amour il s’en moquait en riant ;

Vénus, qui ne pense qu’à ça, lui est après,

Et en soupirante hardie, elle l’attire par ses sourires.

  

   Comme poète, Shakespeare « ne règle pas ses comptes » avec son passé, mais il transpose, il sublime son expérience en en faisant un événement poétique. Il ne se débarrasse pas de son trauma, mais par la narration idéalisée de sa blessure, il « crée » un objet d’admiration qui se substitue à un objet de honte. Tous les poètes savent cela :

 

Quand ils parlent ainsi d’espérances trompées,

De tristesse et d’oubli, d’amour et de malheur,

Ce n’est pas un concert à dilater le cœur.

Leurs déclamations sont comme des épées :

Elles tracent dans l’air un cercle éblouissant,

Mais il y pend toujours quelque goutte de sang.

 

Alfred de Musset, Le Pélican.

 

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