Shakespeare
Sonnet 145
Les sonnets de Shakespeare les plus populaires ne sont pas toujours les meilleurs. Le 18 (Shall I compare thee to a Summers’ day ?) est un peu cucul. Le 130 (My Mistress’s eyes are nothing like the Sun) est carrément méchant. Le 145 a donné lieu à des tas d’interprétations stupides, montrant sans doute la parfaite gratuité du poème.
Those lips that Love’s own
hand did make,
Breath’d forth the sound that said ‘I hate’
To me that languish’d for her sake :
But when she saw my woeful state,
Straight in her heart did mercy come,
Chiding that tongue that ever sweet
Was used in giving gentle doom,
And taught it thus anew to greet :
‘I hate’ she alter’d with an end,
That follow’d it as gentle day
Doth follow night, who like a fiend
From heaven to hell is flown away.
‘I hate’, from hate away she threw,
And sav’d my life saying ‘not you’.
Ont exhalé cette phrase « Je hais »
Contre moi qui
me languissais pour elle.
Mais quand elle vit l’état où j’étais,
La pitié,
aussitôt, toucha son cœur ;
Alors, elle
corrigea son langage
Et rendit un
plus aimable verdict ;
Elle
apprit à m’accueillir autrement :
« Je
hais » modifié prit une autre fin,
La phrase
s’élargit comme le jour
Après la nuit,
pareille à un démon
Qui
abandonne le ciel pour l’enfer.
Elle bannit la haine de « Je
hais »,
Et sauva ma vie en disant « pas vous ».
Écrit en octosyllabes, au lieu du classique
pentamètre iambique, c’est une bizarrerie. Du point de vue de sa position dans
le recueil, il arrive un peu comme un cheveu sur la soupe. Quant à son contenu,
il est mièvre. Et pourtant, les exégètes s’en sont donné à cœur joie. Ils ont
surtout inventé beaucoup de sottises à son propos, allant jusqu’à voir dans
l’expression ‘hate away’ une allusion à Anne Hathaway : la pauvre Mrs
Shakespeare qui n’en demandait pas tant !
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