Les leçons de René Girard
La théorie
mimétique dévoyée
Les supporters de l’équipe Trump-Musk, J.
D. Vance et Peter Thiel, se revendiquent comme « girardiens ».
Aïe !
En
fait, Mr. Vance a bien lu Des choses cachées depuis la fondation du monde,
mais il s’est arrêté au chapitre IV, sans doute épuisé par une lecture aussi
dense ! Lui et ses condisciples font de la théorie mimétique l’analyse la
plus archaïque qui soit. Ils se revendiquent d’ailleurs comme conservateurs et
veulent retrouver, croient-ils, la « Terre promise » qu’a été
l’Amérique des premiers colons blancs. À cette différence près que leurs
glorieux ancêtres ne rêvaient que de conquérir de nouvelles frontières, eux
veulent les fermer et s’enfermer dedans.
Pour l’instant, ils n’ont rien « reconquis » du tout, ils se
sont contentés de casser ce que leurs pères avaient passionnément construit en
quatre siècles. Il n’y a rien de cohérent ni de juste dans leur volonté de
casser. Il n’y a aucune eschatologie. Quel désir les pousse en avant ?
Aucun, à part l’appât du gain. Et ils ne parviendront à leur fin qu’en ruinant
beaucoup de monde, y compris beaucoup de ceux qui les ont élus. Vont-ils
« résoudre la crise » réelle où l’Occident, comme le reste du monde,
s’enfonce ? Il est plus que probable qu’ils vont l’exagérer.
La
« tentation du pire » est très sacrificielle ! Avec la
joint-venture Trump & Co, nous ne voyons aucune lumière au bout du tunnel,
les agitations et les paroles véhémentes ne sont que les symptômes de la crise
et rien de mieux. Passé l’effet de surprise entretenu par cette équipe de
farfelus — effet de surprise dont ils ont plus ou moins conscience qu’il ne
durera pas longtemps —, la catastrophe va se précipiter. Imagine-t-on
l’alliance Trump-Poutine durable, avec leurs egos démesurés ? La mécanique
mimétique va fatalement s’enclencher et les « lecteurs avertis » de
Girard en seront pour leurs frais.
Quant à l’Europe, une partie de ses « élites » est aussi
tentée par la politique du pire : forte est la tentation de ne pas courir
au secours des victimes, et l’Ukraine est leur terrain de jeu autant qu’il est
celui de Poutine.
Mais
on sent bien aussi qu’une conscience se fait jour parmi les dirigeants, et plus
encore parmi les Européens au sens large. Cette conscience des faibles (et Dieu
sait qu’on nous répète assez que l’Europe est faible !) aura-t-elle raison
des plus forts ? Le doux finira-t-il par l’emporter sur le dur ? Nous
n’avons jamais autant eu besoin de Michel Serres.
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